8 juillet 2013 1 08 /07 /juillet /2013 15:42

 

impasse Romarins

 

   Un entrevous est un élément de maçonnerie qui remplit l'espace compris entre deux solives d'un plancher.

   Plutôt que d'entrevous (étymologiquement: entre voûte) on parle aujourd'hui pour les planchers béton, de "marmites", de hourdis; éléments juxtaposés pleins ou creux, en aggloméré ou en terre cuite disposés entre des poutrelles armées, sur lesquels on coule une dalle.

   En septembre 1988, je fus témoin de la démolition d'une maison de la Grand Rue, située en face de l'immeuble Barillon (cadastrée CK n°585). Dans la petite cour intérieure, on pouvait envore voir une remarquable fenêtre géminée aux arcs trilobés qui remontait peut-être au XIVe siècle.

   Sur les décombres de la maison, j'eus la surprise de découvrir de nombreux fragments de dalles en plâtre d'environ 10 cm d'épaisseur, portant sur l'une de leurs faces des motifs en relief (figures géométriques, mais aussi fleurs, blasons et animaux.

 

vue agrandie d'un motif sculpté et peint

 

   On distinguait très nettement que tous ces éléments appartenaient à une même structure, en l'occurence une dalle de plancher faite de chaux et de plâtre, coulée entre et sur des pièces de bois.

   Cette forme de plancher constituée de solives et d'entrevous en maçonnerie se rencontre assez fréquemment, mais ici les entrevous étaient ornés de décors. Pour cette maison qui devait être une demeure aristocratique, un artiste avait sculpté en creux sur les planches du coffrage, des séquences de motifs qui après démontage allaient décorer durablement le plafond. 

   Cette découverte inattendue fit regretter la démolition de la maison médiévale, d'autant que ce genre de décor paraît ancien (fin XVe siècle?) et rare en Provence.

   Depuis, par trois fois, l'occasion m'a été donnée de trouver de nouveaux fragments d'entrevous en tout point semblables aux premiers:

- en 1989, Rue Michelet, dans les démolitions de la banque Avy (CK n°46)

- en 1990, au cours de sondages sur le parking privé de la Mairie

- en 2008, Rue Dupuy-Montbrun, lors de l'opération ADPI (CK n°732).

   Mais mieux encore, nous savons aujourd'hui qu'il existe toujours un plafond intact en place, et mis en valeur par ses propriétaires, Impasse Romarin.

   Ce type d'entrevous se répétait donc au moins en cinq lieux différents de la ville et sans doute davantage si l'on prend en compte le nombre de destructions massives dont fut victime le centre historique de Cavaillon.

   Pour expliquer cette présence on peut probablement parler d'effet de mode, d'engouement; la plupart des "apparents" de la cité voulant avoir chacun leur plafond!

   Bien des interrogations se posent quant à la datation des moules, à la symbolique des thèmes et aux influences, voire à l'originalité de l'œuvre.

   Seule une étude approfondie et exhaustive pourra nous apporter des réponses, et puis qui sait, d'autres entrevous se cachent peut-être encore sous de faux plafonds modernes? Évitons à présent de les détruire gratuitement.

 

Robert SADAILLAN

Bulletin ("Patrimoine et culture" N°13 octobre 2011- chronique)

 


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